1) C’est quoi la chirurgie ambulatoire?
La chirurgie ambulatoire est un mode de prise en charge permettant de raccourcir les délais d’hospitalisation pour une intervention chirurgicale à une seule journée. Vous rentrez donc le matin pour être opéré le jour même et ressortir le soir. La durée de séjour à l’hôpital est de quelques heures à moins de 12 heures.
A l’hôpital de Manosque, nous avons par exemple comme activités en ambulatoire : la cataracte, l’ablation de matériel d’ostéosynthèse (AMO), les dents de sagesse, les hernies, les vésicules biliaires, l’arthroscopie, les IVG…
2) Pourquoi est-il demandé aux établissements de développer la chirurgie ambulatoire ?
Depuis quelques années, les pouvoirs publics prônent le développement de la chirurgie ambulatoire qui pourrait, selon leurs études, concerner 8 opérations chirurgicales sur 10 en France.
Il ne faut pas se voiler la face, l’intérêt économique est la principale motivation justifiant le développement de la chirurgie ambulatoire par rapport à la chirurgie classique.
3) Que pensez-vous du développement de l’ambulatoire?
Nous pensons que cela va dans le bon sens. Nous tendons vers son développement. Si son développement se réalise par le biais d’une réelle politique d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, d’amélioration des conditions de travail, dans une optique de progrès médical et d’adaptation au progrès technique, et avec l’accord sans hésitation du malade, alors c’est une bonne chose.
4) Ces conditions sont-elles réunies à ce jour?
Non ! Ici, la démarche des pouvoirs publics est totalement différente, il s’agit de vouloir réduire la durée moyenne de journée, supprimer la prise en charge de nuit, et supprimer des postes dans le service public hospitalier.
Marisol Touraine a indiqué à plusieurs reprises, que dans le cadre du pacte de responsabilité, l’hôpital public doit être mis à contribution. Parmi les mesures permettant de faire des économies, elle a expliqué que les séjours doivent être moins fréquents et moins longs. C’est pourquoi, elle souhaite doubler le rythme de croissance de la chirurgie ambulatoire. L’objectif sera dès 2016 la réalisation d’une opération sur deux en ambulatoire. Des objectifs seront fixés par région et par pathologie.
L’ARS PACA reçoit depuis le printemps les différents directeurs d’hôpitaux de la région afin de travailler sur l’évolution de la masse salariale, sur l’évolution capacitaire, et sur la procédure d’approbation ou de rejet de l’EPRD 2015. Cela va continuer en 2016 et 2017. C’est la mise en œuvre du « plan triennal », en considération du PRS, du SROS et de la politique régionale.
Dans le plan Triennal, il est prévu 3 milliards d’euros d’économies supplémentaires et 35 millions d’euros supplémentaires pour la région PACA : l’ARS a travaillé sur une répartition des efforts à réaliser pour chaque établissement.
Cela est mis en corrélation également avec la loi santé Touraine en cours, qui commence à être mis en application, alors qu’elle n’a pas été publiée. Tout cela est lié, et l’ambulatoire est un des sujets importants.
5) Concrètement, comment voyez-vous le développement de l’ambulatoire ?
Avec les orientations qui nous sont imposées, nous allons prendre un virage ambulatoire. La CGT reconnait qu’il y a un besoin d’ambulatoire notamment dans le public. Mais cela ne doit pas se faire au détriment de l’hospitalisation traditionnelle.
Quand on développe l’ambulatoire, on est censé développer un réseau de prise en charge à domicile…ce n’est pas le cas. Et puis le développement de l’HAD, des SAD, où en est-on? Il y a quelques jours encore un rapport est tombé sur le secteur libéral et notamment les infirmières, en disant qu’on dépense trop. Mais plus on ferme des lits hospitaliers et plus on réduit les durées de séjour, plus il y a des prises en charge à domicile, c’est le virage qu’on prend. Il y a un vrai souci de prise en charge et de sécurité. D’autant que nous sommes dans un pays où l’accès aux soins est en recul. Il faudrait également noter la particularité de notre région sur l’âge de la population, et nous savons très bien que c’est un facteur qui rend difficile la question de l’ambulatoire. A-t-on chiffré le coût des transports pour le développement de l’ambulatoire ? A-t-on chiffré le surcoût pour les patients sur les restes à charge ? Cette politique n’est pas la bonne, elle vise à fermer des lits dans les hôpitaux publics.
De plus, pour l’ambulatoire, comme pour les urgences, nous avons besoin d’une médecine de ville adaptée, de plus de liens avec l’hôpital, et de développer les centres de santé. En effet, les maisons de santé ne sont pas très attractives pour les médecins. Pour nous la solution est plutôt dans les centres de santé. La question du salariat est un sujet qui monte de plus en plus chez les médecins.
Ce qui nous inquiète également c’est la dégradation des conditions de travail et du pouvoir d’achat. Pourtant aujourd’hui quand on regarde par exemple les heures supplémentaires, les heures de récupération et les intérimaires au sein de l’hôpital public, cela représente un manque d’emplois très important.
Et ce n’est pas en augmentant le temps de travail des agents qu’on réglera le problème. On n’y arrivera pas. De plus, la dégradation des conditions de travail mériterait au contraire qu’on aille vers la réduction du temps de travail. La situation du chômage et la recherche d’une meilleure répartition des richesses mériterait également qu’on se dirige vers une réduction du temps de travail.
La pression budgétaire est trop forte, et même lorsqu’on démontre que nous ne sommes pas en capacité de prendre un patient en charge et qu’il y a des risques pour celui-ci, ce n’est pas pris en compte. Où va-t-on avec ces choix ?