Nous avons eu un CTE le 19 janvier. C’est l’occasion de revenir sur le rôle du CTE et des représentant(e)s du personnel dans cette instance.
1/ C’est quoi être élu(e) au CTE ?
Etre élu(e) au CTE, c’est avant tout être représentant(e) du personnel.
Etre représentant(e) du personnel fait partie d’une légitimité constitutionnelle.
Les articles 6 et 8 du préambule de la constitution de 1946 proclament :
« Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l’action syndicale et adhérer au syndicat de son choix. »
« Tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises. »
La légitimité issue du suffrage universel :
Les Représentant(e)s du personnel sont élus par les salarié(e)s.
Le droit à disposer d’une réflexion et d’une action autonome de celle de la Direction et des tutelles :
* Les représentant(e)s du personnel ont le droit de s’exprimer librement
* Les représentants du personnel ont le droit d’exprimer leur désaccord, de faire des propositions
L’obligation au Président de respecter les droits des représentant(e)s :
* Par l’octroi de moyens
* Par une information exhaustive et sincère
* Par le respect de la procédure des avis et des vœux de la délégation du personnel
L’instance CTE appartient à la délégation du personnel.
La loi n’a qu’un seul objet : celui d’organiser la contrainte destinée à faire respecter cette légitimité par le Président.
Pour rendre effective cette contrainte, les Représentant(e)s Elu(e)s doivent se saisir de leur droits.
Toutefois, il est important de signaler que la loi n’est que la traduction d’un rapport de force politique et socio-économique à un instant T. La loi est donc historiquement datée. Seule l’évolution de ce rapport des forces fait évoluer la loi que ce soit positivement ou négativement.
2/ Quelles sont les prérogatives du CTE ?
Le décret n°2013-842 du 20/09/13 et l’article R.6144-40 du Code de la santé publique régissent les compétences du CTE.
Le CTE est consulté obligatoirement sur certains points :
* Le projet d’établissement
* La convention constitutive des centres hospitaliers universitaires
* Le compte financier et l’affectation des résultats
* Toute mesure relative à la participation de l’établissement à une communauté hospitalière de territoire dès lors qu’un centre hospitalier universitaire est partie prenante ainsi que tout projet tendant à la fusion avec un ou plusieurs établissements publics de santé
* Le rapport annuel sur l’activité de l’établissement présenté par le directeur
* Toute convention intervenant entre l’établissement public de santé et l’un des membres de son directoire ou de son conseil de surveillance
* Les statuts des fondations hospitalières créées par l’établissement
* L’organisation interne et les contrats de pôles d’activité
* Les conditions et l’organisation du travail dans l’établissement, notamment les programmes de modernisation des méthodes et techniques de travail et leurs incidences sur la situation du personnel ;
* La politique générale de formation du personnel, et notamment le plan de formation ainsi que le plan de développement professionnel continu ;
* Les critères de répartition de la prime de service, de la prime forfaitaire technique et de la prime de technicité ;
* La politique sociale, les modalités de la politique d’intéressement ainsi que le bilan social ;
* La politique d’amélioration continue de la qualité, de la sécurité des soins et de la gestion des risques, ainsi que les conditions d’accueil et de prise en charge des usagers ;
* Le règlement intérieur de l’établissement.
Le comité est régulièrement tenu informé sur certains points comme :
* La situation budgétaire et des effectifs prévisionnels et réels de l’établissement. Il est également informé du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens ;
* L’état des prévisions de recettes et de dépenses ;
* Des décisions quant à la constitution et la participation à une des formes de coopération prévues (GCS, CHT…) de la présente partie ou des réseaux de santé.
3/ Peux-tu nous dire un mot sur les avis et les vœux ?
Le CTE est habilité à prononcer des vœux dans le domaine large des compétences qui est le sien.
Il peut aussi donner des avis argumentés. Ces deux actes, vœux et avis, peuvent être décidés par la majorité du CTE sans nécessité d’une saisine par le directeur.
Les représentant(e)s du CTE peuvent donner un avis et/ou un vœux circonstancié sur pourquoi on est pour ou pourquoi on est contre. Le (ou la) secrétaire peut lire cet avis et/ou ce vœux lors du CTE, et demander un vote dans la foulée.
Le comité émet des avis ou des vœux à la majorité des suffrages exprimés.
Ensuite, cet avis / vœux doit être transmis par le directeur de l’établissement dans les 15 jours.
En cas de partage égal des voix, l’avis est réputé avoir été donné ou la proposition formulée.
Les avis ou vœux émis par le comité sont portés par le président à la connaissance du conseil de surveillance de l’établissement. Ils sont également portés par voie d’affichage, à la diligence du directeur de l’établissement, à la connaissance du personnel dans un délai de quinze jours. Le CTE doit, dans un délai de deux mois, être informé, par une communication écrite du président à chacun des membres, des suites données à ses avis ou vœux.
Lorsqu’un projet ou une question recueille un vote défavorable unanime de la part des représentant(e)s du personnel, membres du comité, le projet ou la question fait l’objet d’un réexamen et une nouvelle délibération est organisée dans un délai qui ne peut être inférieur à huit jours et supérieur à trente jours. La convocation est adressée dans un délai de huit jours aux membres du comité.
Le comité siège alors valablement quel que soit le nombre de membres présents. Il ne peut être appelé à délibérer une nouvelle fois suivant cette même procédure.
4/ A quel moment peut-on négocier ?
La consultation ne dispense pas de la négociation.
Il faut rappeler par exemple qu’avant de modifier l’organisation du travail, le directeur a une obligation de négociation avant une consultation des instances. Si la négociation n’aboutit pas, la direction peut passer à la consultation. Un peu comme ce qui s’est passé à l’APHP. Martin Hirsh a lancé une négociation avec les syndicats. Il s’en est suivi une grève, puis un accord avec un seul syndicat la CFDT, représentant seulement 18% du personnel. Cet accord n’est pas majoritaire. Il a ensuite prévu de faire passer un projet en CTE.
5/ Comment se situent les élus CGT dans les CTE
Dans les différents hôpitaux que je connais bien, ce qui fait la différence entre les élu(e)s CGT et ceux des autres organisations syndicales, c’est d’abord la formation. Les syndicats CGT font de la formation des élu(e)s et mandaté(e)s une priorité. Une formation avec des aspects techniques (pour comprendre ce dont on parle), mais également des aspects politiques et revendicatifs (pour mieux comprendre ce qu’on défend et pourquoi).
Ensuite, une priorité est également donnée à la préparation des instances. C’est une très bonne chose car il est important d’être ambitieux, les salariés ne nous élisent pas pour faire de la figuration.
Les syndicats CGT sont souvent « dérangeants » aux yeux des directions, cela est une très bonne chose, cela signifie que le travail de préparation a été réalisé. Cela signifie que les élu(e)s CGT posent les bonnes questions et ne sont pas en dehors du sujet.
Puis, les élu(e)s CGT ne se contentent pas d’émettre des critiques. Ils font des propositions. Et travaillent également sur le suivi des dossiers. Et enfin, ils communiquent ces informations auprès des salariés.
6/ Comment appréhender les budgets ?
Je pense qu’il ne faut pas se focaliser que sur les chiffres.
Si l’ on ne regarde que les comptes, l’interprétation est difficile et les interventions délicates.
Il faut se poser les bonnes questions :
Quelle est la stratégie de l’établissement ?
Les besoins de la population sont-ils couverts ?
Comment l’hôpital se positionne par rapport au SROS (schéma régional de l’offre de soins) ?
Quelle est la stratégie d’investissement de l’établissement ? Etc…
De plus, les chiffres sont interprétables à souhait : par exemple, on peut nous dire que la masse salariale augmente en un an, et que le personnel coûte trop cher, alors que si l’on regarde le détail des comptes, on constate que le nombre d’ETP non médical a stagné contrairement à l’activité qui augmente. Par contre, on remarque que les charges liées au personnel médical augmentent et que le recours aux intérimaires progresse également.
Parfois, on voit des établissements endettés liée à un déménagement sur un nouveau site. Il n’est pas normal qu’un établissement finance son outil de travail. C’est à l’Etat de prendre en charge les frais de construction d’un nouvel hôpital. Surtout quand on a vu ce qui s’est passé avec les emprunts toxiques…c’est la double peine pour les établissements.
Le compte de résultat pluriannuel sur 5 ans permet d’observer et d’analyser les orientations de la direction pour les 5 ans à venir (sur le fonctionnement lié au personnel notamment). Et à partir de là, il y a des possibilités de débats.
Ensuite, les indicateurs sont une chose, mais le travail réel en est une autre. Les directions ont souvent le nez dans les chiffres et dans les données comparant les différents établissements. Mais là nous sommes dans du virtuel. Dans la vraie vie, chaque contexte est particulier, et ce sont les salarié(e)s qui sont le mieux placé(e)s pour donner leur avis comme par exemple, les moyens de réaliser correctement les missions de service public confiées à l’établissement.
Ainsi, il ne faut pas que les militant(e)s cherchent à devenir des experts, des techniciens comptables. Ils / elles sont suffisamment armé(e)s avec les formations syndicales, le travail réalisé en commun et le contact des salarié(e)s pour faire le lien avec la vie dans les services (besoins des patients, conditions de travail etc…).