22 septembre 2014 – Les 12h00 à l’hôpital : Intervention de Cédric Volait, Coordinateur Régional PACA lors du CNF (Comité National Fédéral) des 10, 11 et 12 septembre 2014 à Paris

« Au CNF du mois d’avril, je suis intervenu sur l’actualité en PACA, et j’ai notamment parlé d’un groupe de travail qui allait se mettre en place sur le thème des <<12h00>>. Ce groupe de travail régional s’est réuni 2 fois : le 28 mai à Avignon et le 3 septembre à Toulon.

Il est ressorti de ces 2 réunions :
* une satisfaction de travailler ensemble sur un thème régional
* de nombreux échanges et débats sur cette question
* ainsi qu’un document de travail assez important synthétisant les travaux (ce document est en cours de validation)

Il faudrait environ 1 heure pour lire l’ensemble de ce document. Je vais essayer en quelques minutes de donner quelques idées.

Le premier point de ce document traite de l’aspect réglementaire. Le second point traite des jurisprudences. Le troisième point aborde la responsabilité de l’employeur ainsi que celle de l’employé, quand un salarié travaille hors la loi. Le quatrième point expose les modalités du déploiement des 12h00 dans la région (choix des salariés et dialogue social), comme par exemple des directions organisant des référendums et par là même la démocratie directe au sein d’établissements, remplaçant la négociation collective avec les organisations syndicales. Un référendum, c’est très aléatoire, cela dépend de la qualité du débat qu’il y a eu en amont. Le cinquième point concerne l’impact sur la santé des personnels ainsi que la sécurité et la qualité des soins. Le sixième point revient sur le constat édifiant que dresse l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité) sur les 12h00. Le septième point explique la stratégie employée par la CGT du CH d’Avignon pour obtenir une expertise sur les 12h00, et pour faire face à une majorité d’agent soutenant les 12h00, d’autant plus que la CFDT s’est associée à la direction pour généraliser les 12h00 dans les différents services. Le huitième point concerne l’APHM à Marseille et notamment l’hôpital de la Conception. Les agents de nuit ont toujours été contre les 12h00. La CGT s’est appuyée sur les agents de nuit qui sont contre pour attaquer le dispositif des 12h00, un moratoire a été demandé en CTE, un jugement a été obtenu. Et malgré le jugement, la direction est entrain de travailler avec 3 organisations syndicales pour représenter, dans les futures urgences qui vont se situer à la Timone, un nouveau projet. Le neuvième point synthétise les échanges relatifs au volet politique des 12h00.

Tout cela nous a conduit à réfléchir à pourquoi on en arrive là, quel est le but. La situation du service public aujourd’hui, la volonté de casser le statut, la volonté de le faire casser de l’intérieur par des personnels qui se disent volontaires pour faire quelque chose qui va à l’encontre de la réglementation.

La situation financière des établissements, les plans de retour à l’équilibre, les suppressions de postes cachés, les conditions de travail qui se dégradent, les charges de travail qui s’intensifient, amènent les agents à vouloir fuir l’hôpital, à être présent le moins possible. Les 12h00 vont dans ce sens. Mais, le télétravail va se développer car il va dans le même sens. Les agents vont préférer travailler à domicile pour les mêmes raisons. Les 12h00 sont également un moyen, avec la bénédiction du personnel, de supprimer les RTT.

La position de la CGT, même si elle est difficile, doit être claire. A la CGT, on doit rester le garant de la législation sur le temps de travail. Partir des 12h00 est peut être une erreur. Car les 12h00 sont une des conséquences de toute la mal-vie qui touche les hôpitaux. Et les 12h00 sont un des aspects des attaques qui sont portées dans les hôpitaux publics. Il faut également faire le lien, au niveau interprofessionnel, avec la question du travail le dimanche. Et cela ressemble beaucoup à ce qui s’est passé chez Séphora avec le travail de nuit.

Il faut qu’on arrive à avoir un temps d’avance sur les directions, ne pas se focaliser que sur les 12h00, mais réfléchir en terme de déréglementation du travail. Il faut sensibiliser les personnels en expliquant que la réglementation est aussi là pour les protéger. Il nous faut avoir une réflexion plus large autour de la réglementation du travail qui est protectrice pour les agents, et de la déréglementation du travail.

Après, il faut travailler sur le collectif, mais pour cela, il faut souvent travailler au cas par cas avant de travailler sur le collectif. Ce qui est aussi important, c’est de continuer la réflexion sur le contenu du travail. Il faut arriver à discuter sur les moyens pour arriver à fonctionner, et également arriver à « resolidariser » les gens.

Au niveau national, la règle d’embauche reste le CDI. De même, il faudrait qu’au niveau national, on fixe une règle générale du temps de travail. Les 12h00 sont présentées comme dérogatoire, mais on se rend compte qu’il n’y a rien de dérogatoire. Il faut une revendication de règle de temps de travail et un bon équilibre temps de travail / temps libre. Individuellement au niveau de l’établissement, c’est plus compliqué.

On voit des directions qui commencent à dire : « On sait très bien que les 12h00 ne sont pas la meilleure solution pour pallier au manque de moyens…en 12h00, on a des gens quand on en a pas besoin ». Ce sont des petites phrases qui interpellent et qui laissent présager une réflexion sur d’autres types d’organisation comme les « coupés » par exemple.

Il faut bien expliquer à l’ensemble des agents, qu’ils ont élus des représentants CGT pour les protéger notamment par le biais du CHSCT. Il faut leur demander quel crédit ils vont apporter au syndicat, quel crédit ils vont donner aux élus et mandatés, si aujourd’hui, alors qu’on doit protéger les conditions de travail de tous les salariés, on y déroge parce que ça va arranger tel ou tel agent. Il faut leur expliquer que moralement nous n’engageons pas notre responsabilité à ce niveau car ils ne nous ont pas élus pour cela.

Nous ne sommes pas n’importe quel syndical. Nous sommes la CGT, nous sommes un syndicalisme de transformation de la société. Nous devons réfléchir à la façon de porter la responsabilité de notre organisation. Nous ne pouvons pas nous compromettre avec des valeurs qui ne sont pas les nôtres.

La question des 12h00, c’est aussi de savoir comment on traite l’humain. Cela pose ainsi la question de ce qu’on porte aujourd’hui dans la notion et des missions de service publique, et des questions de solidarité. Il faut le mettre en lien avec la question de la protection sociale et de la Sécu. Et puis ensuite, comment on construit des convergences dans les différents secteurs qui travaillent dans ces champs là. Le salarié a besoin d’avoir des conditions de travail humaines. Cela interpelle donc sur les questions de financement et les moyens donnés au service public. Il faudrait qu’on arrive à travailler sur les 12h00, mais plus généralement sur l’organisation du travail, les moyens donnés pour arriver à travailler dignement. Il faut davantage le porter au niveau interprofessionnel. Par le biais de « l’interpro », nous pourrons peut être arriver à éveiller davantage les consciences.

Cela est également lié à la syndicalisation. Cela est également lié à la formation syndicale tout au long de la vie et de l’accompagnement de nos élus et mandatés.

Les 12h00 apportent des économies selon les directions. Mais, si on ferait les choses correctement, il faudrait plus de personnels (après la mise en place des 12h00) pour ce type d’organisation. Certaines réflexions parlent de 30% d’effectifs en plus. Si on fait un pool de remplacement car on estime qu’on peut être malade, qu’on peut partir en formation, qu’on peut être enceintes etc…, il faut du personnel en plus. Avec les 12h00, on économise des postes là où il faudrait en rajouter. Il y a moins de personnels. Donc, les agents en 12h00 vont être rappelés régulièrement pour faire des heures supplémentaires. Les 12h00, c’est une tuerie pour l’emploi.

Il est important que la CGT revendique un pool de remplacement dans ces services en 12h00.

Même si cela ne parait pas évident et à contre-courant, la CGT a tout intérêt à affirmer ses positions. Au fil du temps, les choses, elles changent. Ce qui serait intéressant, c’est de mettre en place une campagne sur « la réglementation du travail à quoi ça sert et comment ça protège ? », en le mettant en lien avec la santé au travail et le contenu du travail.
Ce serait une campagne nationale revendicative forte à porter qui nous aiderait après dans nos établissements. C’est un travail de longue haleine, pas toujours facile, mais cela paie. Parfois, il faut se battre, parfois on perd des cartes, mais c’est beaucoup plus sérieux et responsable. »