15 octobre 2012 – « Parole de… » , témoignage d’une aide-soignante

Ci-joint le témoignage sincère et poignant d’une collègue aide-soignante.

PAROLE DE…

Tu es un homme, tu rentres dans une chambre et tu es pris pour le médecin.
Tu es une femme tu rentres dans une chambre et tu es prise pour une infirmière……..
Je suis aide-soignant(e). Après quelques mois de formations, je me vouais à prendre soin de l’autre à travailler en équipe…
Diplômé(e) et quelques années plus tard que reste-t-il du prendre soin ?
Mes compétences me permettent de seconder l’infirmier(e), de remplacer l’ASHQ, le brancardier… et petit à petit mon travail a perdu du sens , de sa valeur…
Lever, coucher, laver les patients 10, 20 fois, brancarder, distribuer les repas, faire manger, écouter, aller et venir d’un couloir à l’autre.
5 à 10 départs les après-midis , l’ASHQ n’est pas remplacée , nettoyer, nettoyer et penser à accueillir les patients entrants, les repas, lever coucher….
Courir, toujours courir, vider les sacs de linge, pousser des charriots, aller au Labo, à la radio.
Nous sommes que deux !!
Les sonnettes….les patients ne nous voient pas , alors ils appellent…. Discuter autour d’une table devient compliqué, sans résultat, chacun étant figé dans sa propre souffrance.
Tous dans un même service pour un même objectif et pourtant si isolés dans nos organisations, dans nos souffrances.
Les fossés entre métiers se creusent.
Diplômé(e) et quelques années plus tard, j’ai le dos usé. Je résiste et ne rejoins pas les rangs des aides-soignants partis en invalidité avant la retraite, payés une misère pour avoir donné sa santé au travail.
Je m’accroche et grimpe péniblement les échelles et échelons de mon salaire. Fait de bric et de broc, de primes surtout.
La journée finie, je tire doucement la porte derrière moi pour quelques heures oubliant que mes collègues vont vivre la même chose…j’oublie.
Un jour j’aurai l’envie, l’énergie, la colère et je me demanderai alors, comment nous voudrions tous travailler dans le respect, la dignité..
Travailler pour se valoriser, pour créer, pour participer, pour aider…et tant d’autres adjectifs mais plus celui de travailler pour s’épuiser.
Je m’interrogerai aussi sur cette feuille de paie, sur sa valeur sur son sens et je me dirai alors que tout travail mérite salaire juste et décent.
Ce jour là il ne me faudra pas être seul(e). Alors je rejoindrai le syndicat des AS, celui des catégories C, celui de tous les collègues techniques ASH, Administratifs, Infirmiers, cadre… celui de tous les salariés : la CGT.
C’est tous ensemble que nous porterons plus fort et plus haut nos voix nous exigerons une autre manière de travailler, d’être payé, d’être considéré… de Vivre.

FLO