23 février 2015 – Fonction publique : les syndicats rejettent l’accord sur la qualité de vie au travail

Un accord-cadre sur la qualité de vie au travail dans la fonction publique, offrant des « espaces d’expression » pour les agents, une formation améliorée pour les RH ou une meilleure articulation entre vies professionnelle et privée, a été rejeté vendredi 20 février par la majorité des syndicats.

Le document est le fruit de discussions menées avec les organisations syndicales de fonctionnaires, partant du constat que les évolutions des métiers avaient « conduit à des pertes de repères et au sentiment d’un éloignement des valeurs fondamentales du service public ».

Pour y remédier, l’accord prévoyait la création d’un « droit d’expression directe des agents sur le contenu et l’organisation de leur travail » ou encore « le ‘droit à la déconnexion’ de tout moyen de communication et d’information en dehors des heures de service ». Il se fixait aussi pour objectif de « mieux préparer les agents en position d’encadrement », par la mise en place de dispositifs d’accompagnement et d’une « formation RH pour tous les primoaccédants à des fonctions d’encadrement ».

La CFDT et l’Unsa se sont déclarées favorables au projet d’accord « QVT », mais pas la CGT, ni FO et la FSU, ce qui prive le texte des 50% de voix nécessaires pour être validé.

Délai supplémentaire

« Compte-tenu de l’importance de ce projet », la ministre de la Fonction publique Marylise Lebranchu a cependant « décidé de laisser un délai supplémentaire (jusqu’au mois de septembre) aux organisations syndicales non signataires », annonce-t-elle dans une déclaration transmise à l’AFP. Le texte était initialement ouvert à la signature jusqu’à vendredi 20 février.

Majoritaire (23%), la CGT Fonction publique a rejeté un accord « qui ne remédie nullement » à la dégradation continue des conditions de travail et aux suppressions d’emploi qui, dans certains secteurs, « interviennent de manière encore plus lourde que sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy », a indiqué à l’AFP Jean-Marc Canon, son secrétaire général.

Force Ouvrière remarque également dans un communiqué que le texte, « déconnecté de la réalité au travail », « occulte tous les paramètres négatifs ayant dégradé la qualité de vie au travail ces dernières années ». Elle réserve sa critique la plus forte au « droit d’expression directe des agents », défendue par la CFDT (2e syndicat) et l’Unsa, qui évoque pour sa part « une mesure phare qui marque une nouvelle étape dans l’histoire de la démocratie sociale dans la fonction publique ».

Selon FO, cette mesure est en revanche symptomatique d’un accord qui « tend en permanence à une individualisation forte au détriment des garanties collectives », rappelant qu’en tant qu’organisation syndicale, elle refuse « d’isoler les agents et de les laisser seuls face à la pression hiérarchique ».

(AFP)

Commentaires :

Sous couvert de « démocratie directe », le gouvernement (« spécialiste » comme chacun sait, de pratiques démocratiques) essaie de contourner les instance représentatives, et donc les syndicats.

Même si l’expression directe des salariés doit être favorisée, il y a de forts risques (malgré les termes du textes) que le poids de la hiérarchie se fasse sentir dans ces « espaces d’expression ».

Ces « espaces », même si ce sont les agents qui en font la demande, seront mis en place « à l’initiative de l’employeur » (page 7 du document). Quelle garantie de voir ces demandes aboutir ? Dans quels délais ? Les quelles ?

Les « suites à réserver aux propositions » feront « l’objet d’un examen par les services » (2e filtre à la démocratie directe), et « lorsqu’elle auront un impact sur l’organisation ou le fonctionnement du service » (3e filtre. Qui en décide ? Sur quels critères ?)

Après cela, CT et CHSCT se trouvent totalement zappés, puisqu’on ne consent plus qu’à les « consulter ».
On retrouve là, la version « Fonction Publique » d’un projet concernant le privé : supprimer en les fusionnant, les diverses instance où siègent les représentants élus du personnel (CE, CHSCT, etc… en un seul Conseil d’Entreprise);

Oui à l’expression directe des personnels, mais pas sous la forme d’un gigantesque « forum » regroupant des agents « individualisés et atomisés », à l’issue duquel les « spécialistes » et « experts » s’autoriseront à trier, évacuer, retenir ou dénaturer, les réelles préoccupations des agents, en prenant soin surtout de contourner les instances élues.

Les organisations syndicales ont l’avantage (enfin, cela peut dépendre desquelles !) d’avoir une vision globale des problèmes et de leurs éventuelles conséquences? C’est l’atout d’un collectif qui synthétise les expériences passées. Dans ces conditions, la simple consultation des CT et CHSCT ne suffit pas. Les CHSCT en particulier doivent pouvoir opposer leur véto à toute organisation ou réorganisation du travail qui seraient jugés néfastes aux agents.

Cet « accord cadre » est bien trop flou, permet bien trop d’interprétations, bien trop lourd de menaces.

Nos fédérations ont eu raison de ne pas le signer en l’état.